Il y a quelques années, les amateurs de photographie « traditionnelle » dont je fais partie ont eu très peur en voyant leurs références fétiches disparaître du marché les unes après les autres. Heureusement, la photographie argentique a regagné de l’intérêt auprès des photographes et le marché (bien que de niche, avec les tarifs correspondants) semble pérenne. Même si certains films ont définitivement disparu (sauf dans mon frigo), certains petits fabriquant ont repris le flambeau en perpétuant certains films et produits, voire en en sortant de nouveaux.
Tout cela pour dire qu’il y a quelques temps, je découvris avec plaisir qu’un nouveau film noir & blanc était sorti, de surcroit fabriqué artisanalement, de surcroit en France, il me fallait donc l’essayer !
Après quelques tentatives infructueuses, j’ai pu en obtenir deux exemplaires à la boutique Kodak Express Châtelet.
La particularité de ce film est d’utiliser comme support du papier japonais Washi (d’où son nom), ce qui le destine à des applications artistiques. En outre, c’est un film orthochromatique, donc peu sensible au rouge, ce qui a son importance selon le sujet !
Il est disponible en format 120 et en plans-films.
Prise de vue
Tout appareil moyen format peut convenir, ce qui inclut une bonne partie des appareils « de collection » !
En ce qui me concerne :
- Pour la première pellicule : un Voigtländer Bessa (première version) avec un cache pour faire des photos au format 4.5*6 au lieu de 6*9cm, ainsi qu’un posemètre Leningrad acheté 100 roubles (2€) à une babouchka au marché d’Ismaïlovo à Moscou
- Pour la deuxième : un Pearl River (6*6 bi-objectif chinois sur le principe du Rolleiflex ou Yashica) acheté sur un marché aux puces de Shanghai, avec le posemètre sus-mentionné.
Rien de particulier à ce stade, on cadre et expose normalement, il faut juste prendre en compte la sensibilité de 25 ISO (ou 22 GOST sur un posemètre soviétique).
Développement
C’est ici que l’on rencontre plusieurs particularités par rapport à un film noir & blanc classique :
- on peut développer le film sous lumière inactinique (avantage d’utiliser un film orthochromatique !)
- le développement se fait dans des cuves, on imbibe le film de produit par un mouvement de va-et-vient. En effet le film est très fin (comme du papier à cigarette; j’ai été surpris en développant le premier film, j’ai pensé à une couche intermédiaire entre le papier de protection et la « vraie » couche sensible !) et pour cette raison il est impossible de l’enrouler sur une spire.
- on utilise un révélateur pour papiers. Lomig (le fabricant) recommande de l’Eukobrom dilué à 1+1
Pour ma part j’ai utilisé de l’Eukobrom concentré disponible chez Fotoimpex, que l’on dilue à 1+9 et qui est censé être équivalent à la formulation à 1+1. L’avantage est que le flacon de concentré est plus petit, pratique si vous devez le transporter (ou payer des frais de port !).
Première chose, il faut imbiber le film d’eau pour éviter qu’il ne s’entortille. Malgré sa finesse, il est résistant et l’ensemble du processus se déroule sans encombre.
Les images apparaissent très vite (environ 30 secondes comme en révélant du papier). J’ai cependant révélé pendant 5 minutes pour être certain que les images soient développées à fond.
On n’utilise pas de bain d’arrêt, mais un rinçage à l’eau claire.
Le fixage se fait avec un fixateur standard (par exemple de l’Agfa Agefix pour films et papiers, que l’on trouve en petits flacons à un prix modique).
Je n’ai pas utilisé d’agent mouillant, car vu que le film « boit » les produits, je ne sais pas quelles conséquences cela peut avoir. Et de toute façon, si une poussière vient se placer sur le film, ce n’est pas dramatique…
Résultats
Lors du séchage, le film s’enroule sur lui-même. J’essaierai de trouver des pinces au moins aussi larges que le film, cela fera sans doute gagner du temps de passage sous presse !
On remarque que les négatifs sont très contrastés, la latitude de pose semble moins importante que sur un film classique.
La structure du papier Washi ressort différemment si on scanne le négatif à plat ou par transparence. A plat, les zones claires ont un aspect gaufré (après passage en positif bien sûr), c’est le contraire par transparence, on voit les fibres du papier dans les zones sombres.
Enfin, vu que le papier est moins transparent que la gélatine des films classiques, il faut un bon scanner pour en exploiter toutes les nuances, et pour du tirage par agrandisseur, il faut s’attendre à des temps de pose longs.
Conclusion
Le film Washi offre des perspectives intéressantes et m’a donné envie de recommencer à bricoler en chambre noire !
C’est un film que je conseillerais aux personnes familiarisées avec le traitement en chambre noire et qui s’intéressent aux procédés alternatifs.
Le film Washi est fabriqué par le photographe Lomig Perrotin, il est disponible en format 120 (12€ le film) ainsi qu’en plan-film. On peut le trouver dans certaines boutiques et distributeurs spécialisés, notamment à Paris, Berlin, Londres et … Saint-Pétersbourg ! Plus de détails sur le site de Lomig : www.lomig.fr
Merci pour ce retour d’expérience; car apparemment, c’en est une! Je crois qu’un jour je mettrai un rouleau Washi dans mon Bronica.
Cdlt,
CBàlG
Fantastic work, thanks for the share. How did you uncurl the negs?